mardi 25 décembre 2012

MUSIQUE. KEVIN COYNE.


Le hasard fait parfois bien les choses, nous voulions vous reparler de Kevin Coyne et voici que l'actualité nous rattrape avec la sortie d'un album très particulier. Mais avant d'aller plus loin, il est peut-être nécessaire pour ceux qui ne connaissent pas ou peu l'artiste de retracer brièvement son parcours.
Kevin naît en 1944 en Angleterre dans une famille de la classe moyenne. Il fait des études d'art avant de devenir thérapeute social en 1965. Il s'occupe essentiellement des alcooliques, des drogués et de ceux que l'on dit "en rupture de société". Parallèlement à ce travail, il fait de la musique. Il forme bientôt le groupe Siren qui sortira deux disques sur le label de John Peel, Dandelion. Le succès n'est pas au rendez-vous et Kevin décide d'essayer le solo. En 1972, il autoproduit Case History. Les chansons sont inspirées par les paumés qu'il a rencontrés dans le cadre de son travail. Il dira lui-même ce n'est pas un disque, c'est une période de ma vie. L'album est une réussite, hélas, Dandelion dépose le bilan l'année suivante, Case History perd toute ses chances d'obtenir le moindre succès commercial. C'est alors que le musicien signe chez Virgin Records. Il enregistre en quelques jours un double album qui fera date,le magnifique Marjory Razorblade. L'inspiration n'est pas très éloignée de celle de Case History comme ce sera d'ailleurs le cas pour les quarante albums qui suivront! Premier album chez Virgin et, déjà, premières dissensions. Kevin veut ouvrir le disque avec la chanson qui lui donne son titre mais qui n'a rien d'un hit potentiel, de plus, il la chante a-capella. Ceci n'est pas du goût du label. L'artiste ne lâchera pas. Suit Blame It On The Night (1974) qui sera tiré à peu d'exemplaires et... jamais réédité. Ceci est d'autant surprenant que ce disque ne  contient  que de très belles chansons de surcroît beaucoup plus directement accessibles que celles de Marjory. Viennent  ensuite Matching Head and Feat (1975), Heartburn (1976), puis In Living Black and White (1976), un live époustouflant qui fera décoller Kevin. Le groupe se compose de Zoot Money au piano, Andy Summers (futur Police) à la guitare, Steve Thompson à la basse et Peter Woolf à la batterie, un groupe de rêve pour la musique d'un tel artiste.
Les albums, toujours superbes et d'une rare émotion, se suivront malgré les tensions incessantes entre Virgin et son poulain rétif qui n'en fait qu'à sa tête et qui se moque ouvertement du succès  commercial.  Mais Kevin travaille beaucoup, enchaîne enregistrements et tournées. Écorché vif, il finit par s'épuiser et passe par plusieurs dépressions nerveuses qu'il a un peu trop tendance à vouloir soigner par l'alcool.
En 1983, il enregistre un autre live, le très bon Kevin Coyne Rough and More. Le groupe d'une belle puissance comprend Peter Kirtley à la guitare, Steve Lamb à la basse et Dave Sheene à la batterie. On n'entendra plus parler de Kevin Coyne pendant longtemps. Miné par la dépression, l'alcool et son divorce, il part en Allemagne où, ironie du sort, il va bientôt ressembler à ceux qu'il a soignés et à qui il a donné la parole dans beaucoup de ses textes. Il vit dans des squats et n'a même plus de guitare. Il est récupéré par des musiciens allemands qui essaient de le remettre en selle. Hélas, la bonne volonté ne suffit pas. Suivent quelques albums médiocres. Kevin, pour la première fois de sa carrière, se laisse ballotter par un groupe trop lisse. Cela lui permet tout de même de rester vivant et d'abandonner définitivement l'alcool, ce qui n'est pas rien. Il faudra attendre l'arrivée de ses deux musiciens de fils, Eugène et Robert, pour qu'il renaisse à sa musique. Il va enregistrer encore quelques chefs- d'oeuvre comme Sugar Candy Taxi (1999), Donut City (2004) ou Life Is Almost Wonderful (2002), un duo acoustique avec Brendan Croker, et donner quelques très bons concerts malgré une grave maladie des poumons qui l'oblige parfois à chanter sous assistance respiratoire. Il meurt en décembre 2004. Il s'était produit à Paris pour la dernière fois en février de la même année.
Kevin Coyne était également peintre et écrivain, et non des moindres,vous pouvez voir de très nombreuses toiles et acheter ses livres (en anglais) sur le site: www.kevincoyne.de

La surprise de cette fin d'année est la sortie de Nobody Dies In Dreamland. Home recordings from 1972 (Turpentine Records en association avec Cherry Red Records).
En 1972, un ami offre à Kevin un magnétophone deux pistes. Il enregistre une quarantaine de chansons en une semaine! Il chante son quotidien, ses angoisses, ses colères ou l'amour, comme l'ont fait avant lui les bluesmen. Contrairement aux autres musiciens de l'époque qui s'inspirent de ces derniers, Kevin n'a pas besoin de ça, sa vie est suffisamment riche en joies et en souffrances pour nourrir ses textes et sa musique... , pourtant, curieusement, il est plus près de l'esprit du blues que ceux qui cherchent tout simplement à l'imiter. Ces 19 chansons préfigurent celles de Case History et des autres albums qui suivront. Remercions ses fils et leurs amis de nous faire partager la genèse d'une telle oeuvre.

Profitons-en pour signaler des sorties moins récentes mais tout aussi intéressantes.
Kevin Coyne On Air (Tradition & Moderne).




Virgin n'ayant pas daigné ressortir l'un des meilleurs albums live de l'histoire du rock, le superbe In Living Black and White, on pourra se procurer cet autre live de légende. Le groupe est le même. L'enregistrement d'excellente qualité est l'oeuvre de Radio Bremen en 1975. Seize morceaux dont Eastbourne Ladies, Sunday Morning Sunrise, Saviour, House On The Hill et Turpentine.

DVD. Kevin Coyne. 1979 Live at WDR-Studio L Cologne. (Blastfirstpetite en association avec Rockpalast).(www.blastfirstpetite.com     www.rockpalast.com )


L'un des rares concerts filmés de Kevin Coyne. Sur scène, deux musiciens, Kevin et sa guitare et le complice Zoot Money et ses claviers pour une performance qui tient autant du théâtre que du concert. On sent toute la folie créatrice d'un artiste habité par les personnages de ses chansons plus dépouillées que jamais. De véritables moments d'anthologie avec un Amsterdam poignant, un Saviour comique, une version extraordinaire de Are We Dreaming, l'inévitable Having A Party, un Don't Blame Mandy à nous tirer des larmes et un terrible Burning Head Suite à donner des frissons, sans parler de This World Is Full Of Fools ou de Pretty Park.



Dix-huit titres indispensables du clown triste, parfois gai ou terrifiant mais toujours profondément humain: Kevin Coyne.

Au cas où certains aimeraient aller plus loin dans la découverte, nous leur recommandons aussi la pièce maîtresse de l'oeuvre, Marjory Razorblade, que Virgin a tout de même fini par remastériser, ainsi que la compilation I Want My Crown The Anthology 1973-1980. Des extraits de Marjory Razorblade, Machine Head and Feat, Heatburn, In Living Black and White, Beautiful Extremes, Dynamite Daze, Millionaires et Teddy Bears, Babble, Bursting Bubbles, Sanity  Stomp ,des faces B, des extraits de concerts (entre autres celui de Hyde Park en 1974) etc. 75 titres répartis sur 4 disques qui dressent un panorama d'une oeuvre inoubliable.

Des dizaines de vidéos sont également visionnables sur You Tube.

Une adresse, elle aussi indispensable, pour ceux qui deviendraient accros! Plein d'infos, d'interviews,de photos les textes etc.
http://kevincoynepage.tk/

 

mercredi 19 décembre 2012

MUSIQUE. Blues Run The Game. JACKSON C. FRANK. (Castle).

Il y a des accumulations d'événements tragiques qu'un écrivain hésiterait à utiliser dans un même roman au risque d'être accusé  d'en abuser. La vie de Jackson C.Frank dépasse tout ce que cet écrivain, s'il n'avait pas hésité, aurait pu écrire.
Né à Buffalo (État de New York) en 1943, il passe son enfance dans l'Ohio.Très doué pour le chant, il fait partie de la chorale locale. Il a onze ans quand ses parents déménagent à Cheektowaga. A l'école, sa matière préférée est la musique. Les cours sont donnés dans une annexe en bois. Un jour, la chaudière explose, mettant le feu au bâtiment. Dix huit élèves périssent dans les flammes. Jackson en sort vivant mais brûlé aux mains et au visage, il passe sept mois à l'hôpital. Le traumatisme le laisse complètement apathique, il ne retrouve un peu d'espoir que lorsque l'un de ses professeurs lui offre une vieille guitare.Il apprend très vite à jouer. A seize ans il monte un groupe de rock avec l'un de ses copains mais il se passionne pour le folk. Il rencontre John Kay (futur leader de Steppen Wolf) et tous deux se produisent dans les clubs locaux avant de s'aventurer au Canada.
Au début des années 60, Jackson touche les dommages et intérêts qui lui sont dus depuis l'incendie. Il décide de partir en Angleterre où il découvre une scène folk en pleine effervescence. Il se lie d'amitié avec Al Stewart et avec Simon et Garfunkel. Il fait écouter quelques chansons à Paul Simon qui, très impressionné, lui propose d'enregistrer un disque. Ce sera fait en trois heures dans les studios de CBS. Jackson C. Frank est si timide et si nerveux qu'il joue et chante caché par un paravent! Blues Run The Game sera le seul album qu'il enregistrera. Il est reçu avec un enthousiasme peu commun par la communauté folk et John Peel le passe sur la BBC avant d'inviter l'artiste à le jouer en direct dans son émission. Entre temps Jackson a fait la connaissance d'une infirmière aussi timide que lui, et qui aura elle-aussi un destin tragique. Cette infirmière possède une voix extraordinaire, il la pousse à abandonner son métier pour se consacrer à la musique. L'idée est bonne puisque la dame n'est autre que Sandy Denny,qui se fera connaître avec Fairport Convention. On est en 1965 et le couple fréquente tous les artistes qui comptent dans le domaine du folk de l'époque: John Renbourn, Bert Jansch, John Martyn ou Pete Seeger. Jackson aide ceux, nombreux, qui sont plus pauvres que lui. En 1967, il est victime d'une dépression nerveuse. Il devient incapable de se produire sur scène et ne peut plus écrire. De plus, le public folk se tourne  petit à petit  vers la musique psychédélique, seuls quelques artistes très connus surnageront. Jackson utilise l'argent qui lui reste pour rentrer aux États Unis. Sa maison de disques rompt son contrat. Il travaille comme journaliste et donne quelques concerts qui tournent parfois à la catastrophe. Son histoire avec Sandy Denny ayant pris fin, il rencontre une autre femme et se marie. Bientôt un enfant naît. Il commence à remonter la pente quand son fils meurt de maladie. Sa femme le quitte. Il retombe dans une effroyable  dépression. Il essaie de survivre en abusant des médicaments qu'il mélange à l'alcool mais il se rend compte qu'il perd le contrôle de lui-même et demande à être interné en hôpital psychiatrique. En 1975, il réussit pourtant à enregistrer cinq chansons dans un moment de rémission. Il passe d'hôpital en hôpital avant de vivre dans la rue. Il n'est bientôt plus qu'un clochard méconnaissable et presque invalide lorsqu'un fan de folk, Jim Abott, se met en tête de le chercher... et le trouve. Il parvient à lui faire obtenir quelques royalties sur son album qui a été réédité en 1970. L' histoire pourrait s'arrêter là mais le sort en décide autrement. Alors que Jackson est sorti pour prendre l'air, un fou lui tire une balle dans l'oeil gauche. Il parvient à vivre encore quelques années moins difficiles et enregistre quelques titres dans le milieu des années 90 avant de mourir le 3 mars 1999 d'une crise cardiaque, il avait eu 56 ans la veille.
Mais qu'a-t-il de particulier cet album mythique car la vie de Jackson C.Frank n'explique pas tout si ce n'est le côté sombre de ses textes? Tout d'abord son enregistrement est presque un miracle, l' autre miracle est qu'il ne se soit pas perdu dans les limbes de l'oubli mais, avant tout, Blues Run The Game est un véritable chef- d'oeuvre du folk qu'il a révolutionné. Les mélodies sont d'une beauté à couper le souffle, chacune des lumineuses chansons est une pépite intemporelle portée par une voix exceptionnelle, généreuse et profonde. Le jeu de guitare, relativement simple, apporte juste ce qu'il faut, sans fioritures inutiles, le tout est minimaliste sans jamais paraître pauvre et touche directement au coeur. Les confrères de Jackson C. Frank ne s'y sont pas trompés, rares sont ceux qui n'ont pas repris avec plus ou moins de bonheur l'une de ses chansons. Citons parmi les réussites les reprises de Simon et Garfunkel, John Renbourn, Bert Jansch, Nike Drake, Sandy Denny et Johan Asherton.
Nous vous conseillons de vous procurer de préférence l'édition Blues Run The Game. Expanded Deluxe Edition (Castle) qui comprend l'album originel, les cinq titres enregistrés en 1975, ceux enregistrés dans les années 90 et quelques enregistrements saisis lorsque Jackson n'avait que 17 ans.

jeudi 13 décembre 2012

MUSIQUE. Dynamite Daze. KEVIN COYNE. (Virgin).

Il y a huit ans, le 2 décembre 2004, Kevin Coyne nous quittait à l'âge de 60 ans dans une indifférence presque générale. Pourtant, dans les années 70, il avait été l'un des premiers artistes signés par Virgin Records, il remplissait Hyde Park, faisait la couverture du NME et était demandé pour remplacer Jim Morrison, le chanteur des Doors qui venait de mourir, les critiques le comparaient à Dylan ou à Captain Beefheart. Alors, que s'est-il donc passé? On serait tenté de répondre rien quand on sait de quoi l'homme était capable. Kevin Coyne était d'une intransigeance sans limites lorsqu'il s'agissait de l'intégrité de sa musique. Son refus de tout compromis face au showbiz, à la gloire et à l'argent, son attitude jugée anti-commerciale par Virgin ont fini par faire sortir de leurs gonds ses dirigeants qui voyaient s'envoler disque après disque l'espoir de gagner de l'argent avec un énergumène qui  s'entêtait à parler dans ses chansons de la condition humaine, des laissés- pour- compte, des marginaux et de la folie, tout un monde qu'il avait côtoyé de très près lorsqu'il était travailleur social. Il leur répondra avec son ironie habituelle dans Millionaires et Teddy Bears (Having a party), ce qui leur déplaira fortement. Dans la foulée, il enregistre le superbe Dynamite Daze, l'un de ses albums les plus noirs et les plus hargneux  dans un petit studio de Londres. Il le produit  lui-même avec l'aide du  guitariste Bob Ward. Dynamite Daze n'a rien à envier à l'énergie des punks avec, en plus, des textes d'une beauté sombre parfois très durs. Quelques ballades émouvantes et inquiétantes  (Lunatic, Are you dreaming, Cry) ponctuent les boggies endiablés.  L'album se ferme avec le moqueur Dance of Bourgeoisie. 
Nous vous reparlerons plus en détail de cet immense artiste (il était également peintre et écrivain) qu'il faut découvrir ou redécouvrir d'urgence.
www.kevincoyne.de
www.kevincoyne.co.uk
www.kevincoynepage.tk

                                          
 
        

lundi 10 décembre 2012

EVENEMENT. ESTHER BURNS en concert. PARIS.


ESTHER BURNS (La valeur du vide et The genius of the crowd)   sera en concert vendredi 14 décembre à 18h 30 chez le disquaire indépendant et spécialisé SOUFFLE CONTINU. 22 rue Gerbier.75011. PARIS.
La performance sera inédite puisque musiques et visuels ont été spécialement travaillés pour ce showcase.

La soirée organisée  autour du label ENTROPY comportera deux sets , le duo 18ème BOUDOIR  partagera l'affiche avec ESTHER BURNS.
ENTRÉE GRATUITE.


vendredi 7 décembre 2012

LITTERATURE. JOHN COWPER POWYS.

Il est des auteurs qui reviennent se rappeler à notre mémoire régulièrement. John Cowper Powys est de ceux-là. De temps à autre, nous ressentons le besoin de relire l'un ou l'autre de ses ouvrages que nous avons l'impression de découvrir sous un autre jour et qui a souvent pour effet de nous donner envie de replonger dans sa philosophie si particulière, une philosophie sans dogmes, en dehors de tout système, une philosophie qu'il a amplement développée dans l'essai intitulé Apologie des sens (1930). Cet essai n'a d'ailleurs pas été réédité depuis 1977, année où il est sorti en Livre de Poche. Nous ne pouvons que le regretter et espérer qu' une nouvelle édition verra bientôt le jour.
John Cowper Powys (1872-1963) , figure étonnante tant par sa vie que par son oeuvre de démiurge, a  souvent été comparé à Rousseau, à Proust, à Joyce ou à Dostoïevski par les critiques peinant à cerner un univers d'une rare originalité. Poète, romancier, essayiste, conférencier, critique littéraire et philosophe, l'auteur a creusé son propre sillon sans jamais perdre le cap. Jean Wahl, qui signa la très belle préface de Les sables de la mer, est certainement la personne qui a su le mieux définir l'art de Powys:
Pour celui qui a passé par ce livre, bien des lois sont devenues non existantes, bien des commandements frivoles; car il s'agit d'une communion avec les sanglots primaires, avec le sel des larmes, avec la porosité de la joie, avec le défi suprême à la langue acérée et avec l'ultime confiance qui vient à nous dans le privilège des instants et des instincts. A travers ces grandes phrases qui montent et qui descendent, ce qu'obtient Powys, c'est à la fois de nous envelopper dans ce climat si humain qu'il devient ultra-humain, et de nous transpercer de l'éclat de ces révélations fulgurantes.
Si ce paragraphe est particulièrement adapté à ce roman, il l'est aussi pour l'ensemble de l'oeuvre de cet écrivain hors- normes qu'il est urgent de découvrir ou de redécouvrir, lui qui disait déjà en 1930 dans Apologie des sens:
Mais la race humaine, en ces temps modernes voués au culte du commerce, s'est laissée prendre dans l'engrenage d'une inexorable machine qui transforme des êtres vivants et sensibles en autant d'automates livides, désarticulés comme des marionnettes.

Bibliographie non exhaustive:
# Psychanalyse et moralité.(Essai).
# Autobiographie.
# Givre et sang.(Roman).
# Camp retranché.(Roman).
# La fosse au chien.(Roman).
# Les enchantements de Glastonbury.(Roman).
# Apologie des sens.(Essai).
# Les sables de la mer. (Roman).

Un très beau site est spécialement consacré à John Cowper Powys et à ses frères Theodore et Llewlyn. Nous vous le conseillons vivement. Surtout n'oubliez pas d'alller voir le livre virtuel Les sables de la mer illustré de très belles photos des lieux que décrit l'auteur.

www.powys-lannion.net

Un autre lien des plus intéressants pour ceux qui veulent en savoir plus :

 http://ia802703.us.archive.org/34/items/Granit1-2-JohnCowperPowys/Granit1-2-JohnCowperPowys.pdf
 


lundi 12 novembre 2012

MUSIQUE. The Psychedelic Pill. NEIL YOUNG. (Reprise).

"Le Zig!" avait salué les retrouvailles de Neil Young et du Crazy Horse pour l'album Americana, tout en regrettant que le "loner" se cantonne dans les reprises du folk américain, même si le groupe s'était approprié de belle manière ces standards.
Dans sa biographie, intitulée tout simplement "Une biographie" (Robert Laffont), le musicien lui-même se demandait si sa muse reviendrait un jour le visiter. Le galop d'essai  de Americana n'a pas été vain, dans la foulée, les complices de longue date ont enregistré ce Psychedelic Pill, un double album de huit titres qui s'ouvre avec Driftin'back, un titre de presque 27 minutes! Les deux chansons suivantes  frisent, elles, les 17 minutes, de quoi laisser de la place aux joutes de guitares entre Neil Young et Frank Sampedro qui ne s'en privent pas. Vient ensuite Born in Ontario, un bel hommage à la ville qui a vu naître ce musicien hors du commun. Deux morceaux country- rock "youngiens" à souhait, une superbe ballade (For the love of the man) et un  rock graisseux qui justifierait à lui seul le qualificatif "grand-père du grunge" que certains ont attribué à Neil Young composent le deuxième disque.
 Le musicien peut être rassuré, sa muse ne l'avait pas abandonné. Qui peut se vanter de pouvoir sortir à 67 ans l'un de ses meilleurs albums?  
                                                   www.neilyoung.com


lundi 22 octobre 2012

EVENEMENT POESIE. Les Pérégrinations Littéraires.

Chaque année, dès que les forêts se parent d'ocre et d'or, Le Zig s'en va par les chemins du Haut-Jura admirer la montagne et écouter poètes et écrivains dire leurs textes et parler de leur art. Ils nourriront son esprit pendant une bonne partie de l'hiver. Le rituel est orchestré chaque automne par Saute-Frontière, association qui accueille des auteurs en résidence et qui a créé la Maison de la Poésie transjurassienne. L'édition 2012 avait justement pour titre "En jeu la poésie". Le Zig présentera au fil du temps plusieurs poètes qui l'ont particulièrement touché. Fred Griot, bien sûr, avec ses textes sculptés dans la brume, la pluie et le vent. Sa prestation avec PARL # / rhythm and poetry trio composé de Fred Griot (textes et voix), Dan Panama (guitare) et de Eric Groleau (batterie) a été un grand moment de musique et de poésie. Nous reviendrons aussi sur l'inénarrable Charles Pennequin, son humour décapant, sa rage et sa profonde humanité. Nous parlerons de l'auteur en résidence, Pierre Soletti et de son frère Patrice Soletti qui ont présenté deux spectacles très "rock'n'roll", laissant une belle place à la musique et montrant, s'il en était besoin, qu'une nouvelle génération de poètes est née. Ces journées étaient clôturées par une lecture de Serge Pey accompagné du poète-chanteur basque Benãt Achiary et de son fils, le percussionniste Julen Achiary. Une émotion presque palpable a fait briller les yeux d'un public conquis.
Émotion est d'ailleurs le mot qui caractérise le mieux ces moments de rencontres, de découvertes et de poésie. Cette émotion que l'on a également ressentie lors de la restitution de l'atelier d'écriture de Fabienne Swiatly  au Lycée des arts du bois, Pierre Vernotte à Moirans-en-Montagne. L'auteure a su amener les participants  à s'exprimer pleinement dans certains textes d'une profondeur peu commune au regard de leur âge.
Saute-Frontière prépare le Printemps des Poètes, nous ne pouvons que nous réjouir d' aller vers l'été comme nous allons tous les ans vers l'hiver! 
www.sautefrontiere.fr
www.fgriot.net
www.pierresoletti.fr
www.patricesoletti.com
www.myspace.com/electricpopartensemble
Fabienne Swiatly: www.latracebleue.net





  

lundi 8 octobre 2012

MUSIQUE. Hoping For The InvisibleTo Ignite. FAREWELL POETRY. (Gireh Records).

Farewell Poetry est né de la rencontre entre le compositeur Frédéric D. Oberland et  la poétesse et réalisatrice Jayne Amara Ross. Hoping For The Invisible To Ignite est le premier album d'un collectif qui s'attache à allier musique, cinéma et poésie. L'album est accompagné d'un DVD contenant un court métrage et une prestation en live.
La musique oscille entre post-rock et musique expérimentale. Sombre et passionnée, elle accompagne la voix profonde de Jayne Amara Ross qui dit ses textes inspirés par les grands mythes. Inclassable et d'une belle originalité, Farewell Poetry s'inscrit dans cette mouvance qui, depuis quelques années, emmène le rock vers des horizons insoupçonnés, mariant avec bonheur les nouvelles technologies à l'instrumentation "traditionnelle" , donnant à la musique un  relief   étonnant et faisant abstraction des étiquettes et des modes.
Mais la meilleure façon de découvrir la musique est de l'écouter!


 


 

mardi 2 octobre 2012

ESSAIS. Le sport barbare.Critique d'un fléau mondial. Marc PERELMAN. (Michalon). Le sociographe. Recherches en travail social. (No 38).

Il ne se passe pas une semaine sans que les frasques des sportifs (que beaucoup continuent non seulement à admirer mais à donner en exemple aux enfants) n'alimentent la presse et même la chronique judiciaire. Tricheries, dopage, scandales sexuels, violence, racisme etc. entachent régulièrement toutes les disciplines, du foot-ball à l'athlétisme en passant par le cyclisme, le rugby ou le tennis. Tout le monde feint de s'en étonner. Marc Perelman lui, a compris depuis longtemps que tout cela n'est pas le fruit du hasard et démontre dans cet essai que c'est le sport, et plus particulièrement le sport de compétition, qui génère cette barbarie dans laquelle ont basculé des pans entiers de la société. Certains lui ont reproché de manquer d'objectivité et de vouloir avant tout faire passer ses idées politiques. Il faut cesser d'être hypocrite, lorsque l'auteur dit que l'institution sportive est une des institutions phares du système libéral-capitaliste, il ne fait qu'énoncer une vérité très simple à démontrer, ce dont il ne se prive pas, comme il ne se prive pas de justifier son sous-titre Critique d'un fléau mondial. Les réactions très vives face à ce petit livre édifiant n'ont fait que confirmer que le sport est le nouvel opium du peuple (plus aliénant que la religion).  Marc Perelman écrit également que le sport lamine tout sur son passage et devient le seul projet d'une société sans projet.
On retrouve cette analyse sous la plume de Ronan David et de Nicolas Oblin Parce que la compétition n'est pas un jeu... dans la revue Le sociographe intitulé Sport à tout prix? qui propose une réflexion sur le bien-fondé de l'utilisation du sport à des fins d'insertion et de socialisation des personnes en difficulté, notamment des jeunes. Ces deux auteurs vont jusqu'à affirmer que Si le projet sportif jouit d'une telle aura, d'un tel accueil, c'est qu'il constitue un véritable fétiche qui permet aux institutions qui se l'accaparent de faire l'économie de véritables projets de socialisation et de transformations des réalités sociales instituées.
Il est bon de rappeler que Le sociographe a pour objectif de promouvoir et de favoriser la recherche en travail social. Si dans ce numéro certaines personnes essaient de trouver quelques vertus à l'éducation par le sport, leurs arguments restent peu convaincants face aux arguments de ceux qui déclarent que la construction identitaire qui emprunte au sport repose d'une part sur l'attachement aliénant à la performance, relève d'autre part de la socialité sportive qui implique elle- même la notion d'adversaire .
Ceux qui ne seraient pas convaincus par ces critiques, comme ceux d'ailleurs qui auraient envie d'approfondir le problème pourront lire également Halte aux jeux! d'Albert Jacquard. (Le Livre de Poche).

vendredi 28 septembre 2012

LITTERATURE. Le terroriste noir. TIERNO MONENEMBO. (Seuil).

Abbi Bâ est Guinéen, engagé dans les tirailleurs sénégalais. Un jour de 1940, un jeune garçon et son père qui cherchent des champignons le trouvent à demi inconscient à la lisière d'une forêt. C'est le début d'une belle et terrible histoire entre les habitants d'un petit village des Vosges et cet être étrange et mystérieux. "Le nègre", comme la plupart l'appelle (on n'a jamais vu à Romaincourt un homme d'une autre couleur que la couleur locale), va très vite faire partie de cette communauté encerclée par la guerre. Il devient un fils, un frère, un père, un ami pour beaucoup.Il va mettre en place l'un des premiers maquis de la région et sera torturé avant d'être fusillé. L' histoire est racontée par une vieille femme de 80 ans qui s'entretient avec le neveu de Abbi Bâ 60ans après sa mort, alors que l'on baptise une rue du village de son nom.
On aurait pu craindre un récit linéaire et didactique se contentant de relater les faits, Le terroriste noir (comme le surnommaient les Allemands) étant tiré d'une histoire vraie.
Il n'en est rien. Le talent de conteur de Tierno Monénembo, son écriture incisive et fleurie, son humour, sa façon de montrer la vie quotidienne d'un village vosgien comme s'il s'agissait d'un village africain, font de ce roman un petit chef-d'oeuvre sans pathos ni manichéisme pesant. Les personnages de chair et de sang sont terriblement attachants. On se souvient longtemps de Yolande, Huguette ou Etienne.
Ce livre est un très bel hommage à ces hommes de l'ombre qui nous fait oublier tous les romans et les films plus ou moins médiocres (excepté Le camp de Thiaroye de Sembene Ousmane) inspirés par les tirailleurs sénégalais.


samedi 22 septembre 2012

MUSIQUE. SISKIYOU. Mauvaise nouvelle.

Siskiyou nous annonce une mauvaise nouvelle. Suite à un problème de santé dans le groupe, ce dernier est obligé de se mettre en pause. En attendant des jours meilleurs, nous vous conseillons d'aller visiter son site sur lequel il présente une belle  vidéo  de Brett Story.

www.siskiyouband.com

En espérant un retour rapide de ce groupe exceptionnel voici trois autres titres dont deux en live. D'autres vidéos sur le site de la maison de disques Constellation:

http://cstrecords.com/siskiyou/






jeudi 20 septembre 2012

PHOTO. ROGER BALLEN. (Photo poche. Actes Sud)

L'oeuvre de Roger Ballen commence avec le recueil Boyhood publié en 1979. Le photographe montre la cruauté de la condition humaine et le va-et-vient entre normalité et anormalité. Les images sont marquées par le deuil, ce qui s'explique par la mort tragique (en 1973) de sa mère qui l'avait initié à la photographie. En 1986 sort Dorps . Ballen vit en Afrique du Sud depuis 1982 après avoir voyagé pendant cinq ans. Avec ses fils en désordre sortis du mur derrière les modèles, les laissés-pour-compte de ce pays enfermés dans leurs chambres sinistres, Dorps annonce la direction que va prendre l'artiste. Platteland, publié en 1994, est consacré à une série de portraits d'hommes et de femmes détruits, grimaçant des sourires parfois grinçants, des visages dont chaque détail dit la détresse physique et psychique et dont la vue est parfois insoutenable. Outland sort en 2001, Ballen commence à mettre en scène ses photos avec l'invasion des fils de fer, les masques et les graffitis. Les portraits ici encore sont inoubliables. Avec Shadows Chamber (2005), la réalité se met à basculer dans le rêve ou le cauchemar. Les images se transforment petit à petit en tableaux surréalistes. Les personnages disparaissent ou deviennent les jouets d'une force qui les dépasse. L'humain finit par s'effacer en même temps que le réel. Dans Boarding House (2009) il ne reste plus que sa trace et les débris qu'il laisse derrière lui. Asylum, sa nouvelle série, marque la disparition de la figuration. Les seuls êtres vivants sont les oiseaux qui s'ébattent dans les restes d'une humanité qui n'est plus que dessinée quand elle est encore présente. On pense à Samuel Beckett ou même à Anthonin Artaud dans cette démarche radicale qui navigue entre rêve et réalité et nous fait découvrir un monde aussi étrange qu'inquiétant.
Ce livre reprend quelques clichés de chacune des oeuvres de ce très grand photographe qui n'a jamais cherché à séduire et qui ne cesse de nous questionner.
Site officiel de Roger Ballen:

lundi 6 août 2012

PEINTURE. MOCHE KOHEN.

Jusqu'au 19 août Volterra présente à Beaulieu (Lausanne) une exposition qui a pour titre
 L' humanité. Le thème en est le corps humain. Elle montre quelques oeuvres de chacun des 21 artistes (peintres et sculpteurs) qui tentent de "re-lier la chair de l'humain et sa spiritualité perdue". S'y côtoient des artistes de grande notoriété comme Jean Rustin ( voir la chronique sur ce blog) ou Lydie Arickx et d'autres moins connus. Nous ne saurions trop vous conseiller de visiter cette très belle exposition. "L'art ici est un combat, loin des spéculations financières et des institutions culturelles officielles". (Sophie Orie). Pour notre part, nous avons découvert quelques artistes qui nous ont conquis et bouleversés, Moché Kohen fait partie de ceux-là.
 
Né en 1970, il vit et travaille à Tournai, en Belgique. Contrairement à d'autres peintres participants à cette exposition, il est adepte d'une réalité presque "sage". Moins expressionniste que la plupart de ses confrères, il sait, par un savoir-faire admirable allié à une âme de poète, faire de chacun de ses personnages une figure allégorique aussi proche qu'énigmatique. Tous nous regardent en face et semblent nous questionner autant que nous les questionnons. A la fois familiers et lointains ils surprennent par leurs visages étonnamment enfantins dont les yeux d'adultes reflètent une douleur indicible. Apparitions ou figures de rêve, ils ont quelque chose d'étrange et de troublant, à l'image de cette magnifique Prisonnière dont le beau visage pourtant souriant prend une intensité dramatique avec la robe blanche qui paraît tachée de sang.
Si Moché Kohen dit avoir été marqué par le travail de Egon Schiele, il a su se démarquer de ce dernier par une approche moins crue mais toute aussi émouvante des corps et de la chair. Du grand art.
Vous pouvez entrer dans l'univers de Moché Kohen en visitant son site:
www.mochekohen.com

Renseignements sur l'exposition:

samedi 28 juillet 2012

ESSAI. Ecrits sur l'art. HUYSMANS. (GF Flammarion).

A partir de 1876 Huysmans, qui avait déjà publié des descriptions de tableaux de peintres hollandais, devient chroniqueur d'art pour différents journaux. Il rédige des comptes rendus des différents Salons de peinture et découvre les jeunes artistes indépendants qui exposent à l'écart des Salons officiels dans lesquels leurs oeuvres sont refusées par un jury réactionnaire et soumis à l'état. Ces artistes ont pour nom Manet, Degas, Monet, Caillebote, Forain, Pissaro, Cézanne, Sisley etc. autrement dit la plupart des peintres impressionnistes. Il adhère complètement à leur conception de l'art et défendra le mouvement jusqu'à lui donner ses lettres de noblesse. Il ne cessera de fustiger la peinture officielle et "la médiocrité des gens élevés dans la métairie de Beaux-Arts".
D'un jugement sûr, il possède un oeil aiguisé sur tout ce qui concerne l'art de son temps. Malgré son ironie et son écriture caustique, il sait nuancer ses propos, rester objectif et ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain... tant qu'il ne s'agit pas des peintres officiels et vénaux qu'il traite de "tailleurs et de teinturiers" qui déguisent leurs modèles plutôt que de les prendre dans la rue ou dans leur milieu, tels qu'ils sont, avec leurs habits de tous les jours, dénonçant leur incapacité à peindre le vivant.
La 1ère partie de ce volume de plus de 450 pages , L'Art Moderne, est consacrée à la critique des différents salons de 1879, 1880 et 1881. La seconde, Certains, aligne une suite de choix et Huysmans prend le temps de s'attarder sur le travail de plusieurs artistes: Gustave Moreau, Degas, Raffaelli, Cézanne, Forain, Rops, Millet, Goya, Turner, Odilon Redon etc. analysant les toiles afin de rendre une "vérité chère à l'écrivain". Dans la troisième partie, il rend hommage à "Trois primitifs" parmi lesquels Grünewald qui lui inspire de magnifiques pages.
La critique chez Huysmans devient oeuvre d'art dans laquelle l'humour côtoie la colère ou l'admiration. Il est l'auteur de certains des plus beaux chapitres jamais écrits sur la peinture. Il est capable non seulement de nous faire voir une toile mais également de nous faire respirer l'odeur de la campagne, de nous faire ressentir le froid de la neige, l'humidité des jours pluvieux et même de nous faire entendre la voix des personnages qui deviennent vivants sous sa plume.
Ces "Ecrits sur l'art" sont indispensables à tous ceux qui aiment la peinture et une littérature exigeante mise au service de l'art pictural comme elle l'a rarement été.

dimanche 15 juillet 2012

LITTERATURE. Huysmans au coin de ma fenêtre. CLAUDE LOUIS-COMBET. (Fata Morgana).

L'auteur le dit lui-même, ce livre n'est pas un essai sur Huysmans mais un témoignage de reconnaissance vis à vis d'une écriture qui a imprégné sa sensibilité littéraire, son sentiment esthétique et son sens du spirituel. Il continue aujourd'hui, à 80 ans et après avoir écrit une quarantaine d'ouvrages, à lire celui qu'il appelle "le maître" et conserve pour l'oeuvre comme pour l'homme une véritable admiration. Ceux qui connaissent la qualité, l'exigence et la teneur de l'oeuvre de Claude Louis-Combet apprécieront.Il est rare qu'un écrivain avoue ce qu'il doit à ses prédécesseurs avec une telle simplicité et une  telle humilité: Huysmans est le seul auteur dont je pourrais me réclamer s'il me fallait répondre à une question qui porterait sur le lien établi, dès le début et à la longue, entre l'écriture et l'existence.
Ce superbe livre dans lequel l'écriture est magnifiée donne envie de découvrir ou de redécouvrir autant Claude Louis-Combet que Huysmans ou des artistes qui les ont marqués tous les deux, comme Odilon Redon, Matthias Grünewald ou Félicien Rops.

Né en 1848 , Joris-Karl Huysmans prit une part active à la vie littéraire et artistique de la fin du XIXème siècle. Par son oeuvre de critique d'art, il a fortement contribué à lancer l'impressionnisme et le symbolisme.
Ecrivain d'inspiration ouvertement naturaliste, ami de Zola, il publie son premier roman en 1876. Plusieurs ouvrages de la même veine suivront jusqu'en 1884. Cette année-là,sort A rebours qui rompt brutalement avec le naturalisme en intégrant dans la narration des réflexions sur l'art, la littérature et la spiritualité. Huysmans commence à s'interroger sur la question de la foi. Là-bas (1891) marque la première apparition du personnage de Durtal (dont Claude Louis-Combet dit: J'étais, j'ai toujours été, proche de Durtal et très loin de lui. ) que l'on retrouvera dans les trois romans suivants. Avec En route (1895), l'auteur retrace les étapes de sa longue et difficile conversion au catholicisme. Suivront La cathédrale (1896) et L'oblat (1901). Après sa conversion, Huysmans redécouvre l'art religieux et en particulier la peinture des primitifs qui lui inspirera de magnifiques textes, notamment sur Matthias Grünewald. Il mourra en 1907 d'un cancer de la mâchoire, laissant une oeuvre qui n'a pas vieilli, ni dans la forme ni dans les thèmes abordés.

jeudi 28 juin 2012

MUSIQUE. Red Sugar. WINTER FAMILY. (Sub Rosa. Ici d'ailleurs...)

La bio officielle de Winter Family annonce la couleur avec un certain humour. Après nous avoir renseignés sur l'identité des deux protagonistes, elle nous apprend que Xavier Klaine (Français) développe des couches de drones folk avec Philicorda, orgue à tuyaux, piano, harmonium ou célesta, tandis que Ruth Rosenthal (Israélienne) chante ses poèmes et joue de la batterie dans un univers mystique rempli de tristesse, de politique, de romantisme noir et que, ensemble, ils pourraient nous déprimer sérieusement. S'il est vrai que l'on voit mal l'étrange duo animer une fête de la bière ou une arrivée d'étape du Tour de France, sa musique toute en ombres et en lumières n'est pas pour autant lugubre! Tantôt éthérée, tantôt d'une violence rentrée, elle nous emmène de Jérusalem, "ville maltraitée par ses habitants", à la vie presque idyllique dans une ferme de la Sarthe. Les textes, courtes nouvelles dites d'une voix profonde en hébreux, en anglais ou en français plutôt que chantés, sont admirablement bien écrits et prennent racine selon l'humeur dans la vie de tous les jours, dans les guerres présentes ou passées...et les Saintes Écritures. Les sons enregistrés dans les rues de Jérusalem ou à la ferme ponctuent les morceaux et lancent des ponts entre eux, apportant un supplément de vie à cette musique intimiste et dépouillée impossible à définir.
Winter Family est inclassable et son univers, sans être difficile d'accès, demande tout de même une véritable attention afin d'en saisir pleinement toutes les finesses et les subtilités. Red Sugar est le deuxième disque du groupe qui a débuté sa carrière avec le superbe double-album Winter Family dont il est le digne successeur. Il est rare qu'une musique puisse susciter autant d'émotions diverses. Une expérience à ne pas manquer.
Le duo collabore avec de nombreux artistes, chorégraphes, réalisateurs et photographes. Il joue dans des endroits improbables et complètement différents les uns des autres: églises, chapelles, lieux "underground", galeries d'art etc. Il a également conçu un spectacle, JERUSALEM PLOMB DURCI. Voyage halluciné dans une dictature émotionnelle, qui a reçu le Prix du Jury du meilleur spectacle, Festival Impatience 2011.

lundi 25 juin 2012

BD. Egon Schiele. XAVIER COSTE. (Casterman).

On ne sait que peu de choses de l'un des peintres les plus controversés et les plus sulfureux du XXéme siècle. Ecorché vif, angoissé permanent, provocateur, obsédé par la mort et le sexe, toujours dans l'excès, Egon Schiele (1890-1918) était un homme équivoque, profondément marqué par la mort de son père alors qu'il n'avait que 15 ans. Xavier Coste n'a pas essayé d'embellir le personnage dans cette biographie romancée. Il nous montre la complexité de l'homme et ses aspirations artistiques . Le piège aurait été pour ce jeune peintre (Xavier Coste n'a que 22 ans) de dessiner à la manière de son héros. Il a choisi  exactement le contraire : un trait élégant, presque classique, préférant travailler sur les couleurs de prédilection de ce dernier, les bruns, sépias  et gris, qui rendent magnifiquement l'atmosphère de l'époque et d'une vie qui ne fut une réussite que par la production d'une oeuvre aussi fascinante que singulière. Les dernières paroles attribuées à Egon Schiele par son ami Arthur Ruessler furent en effet: "C'est triste et il est difficile de mourir mais ma mort n'est pas plus pénible que ma vie qui a offensé tant de gens".
Ce très beau premier album est indispensable à tous ceux qui aiment Egon Schiele et la BD.
Nul doute que Xavier Coste entre dans le genre par la grande porte.

mardi 19 juin 2012

MUSIQUE. If then not when. KING'S DAUGHTERS & SONS. (Chemikal Underground Records. Pias).

Premier disque pour un tout nouveau groupe venu de Louisville (Kentucky). Entre tradition et modernité, King's Dauthers & Sons nous offre 8 titres d'une beauté sombre dans la lignée de Mark Hollis ou Vic Chesnutt sans pour autant se départir de son originalité. If then not when chanté à trois voix allie les climats feutrés de l'acoustique à ceux, orageux de l'électrique pour des chansons superbes. Venus d'horizons différents, les cinq musiciens ont su créer l'osmose parfaite entre piano, guitares, basse et batterie. Le résultat est un très bel album à la fois fragile et solide, brut et ouvragé qui prouve à chaque instant que l'héritage du rock et du folk est encore fertile quand il est utilisé avec un tel talent.
A noter une pochette aquarellée dont les tons sépias s'accordent à merveille avec le contenu.
http://www.kingsdaughtersandsons.com/

lundi 11 juin 2012

POESIE. La louche et autres poèmes. JOHN BERGER. (Maison de la poésie Rhône-Alpes. Le Temps des Cerises.)

John Berger, écrivain anglais né à Londres en 1926, vit en France depuis le début des années 70. Il habite un petit village de Haute-Savoie et fait maintenant partie du paysage, discutant et aidant les paysans qu'il a décrit de façon magistrale dans la trilogie Dans leur travail (traduit dans le monde entier) qui comprend La Cocadrille, Joue-moi quelque chose et Flamme et Lilas .
John Berger a tout d'abord pratiqué la peinture (il continue à dessiner régulièrement) avant de se faire un nom comme essayiste et critique d'art. Son livre Voir le voir, qui a donné lieu à une série sur la BBC est devenu un classique de la pensée théorique sur l'art et le regard.
Il s'essaie à la fiction avec un grand talent puisque son roman G recevra en 1972 le prestigieux Booker Prize. L'auteur provoque un scandale en décidant de donner la moitié de la somme qui lui est allouée aux Black Panthers, l'autre moitié étant destinée à faire une enquête et un livre sur la condition des immigrés en Europe. Il a édité depuis un grand nombre d'ouvrages qui mêlent souvent essai, roman et poésie. Tous ces livres ont en commun de dire le monde et les hommes avec une extraordinaire originalité. Souvent qualifié d'écrivain engagé, John Berger est plus que cela, il suffit de le rencontrer pour être saisi par son charisme et sa grande humanité, humanité qui traverse toute son oeuvre.
La louche et autres poèmesne fait pas exception à la règle et l'auteur signe-là quelques-uns de ses plus beaux textes, à l'image du très touchant Mort de la Nan M, des textes qui s'appuient sur la réalité, qui prennent racine presque dans la terre pour s'élever ensuite vers l'imaginaire. Ils font parfois penser à des tableaux de Chagall dans lesquels les animaux de la ferme ne sont pas étonnés de voir passer au-dessus d'eux un homme qui vole avec la tête en bas!
Nous devons ce très beau recueil bilingue illustré par Yves Berger, le fils de John, à La Maison de la Poésie Rhône-Alpes qui publie régulièrement la belle revue Bachannales et collabore de temps à autre avec les éditions Le temps des Cerises pour sortir des Hors-séries de grande tenue. Nous vous conseillons, outre celui-ci, le précédent Je sens qu'on me balance un coup de latte dans les reins ou Tout ce qui reste de Jack Hirschman (qui faisait partie des 57 poètes édités dans Changer l'Amérique, une anthologie de la poésie protestataire des USA (1980-1995)) accompagné de dessins et de peintures de Bruce Clarke.
http://www.maisondelapoesierhonealpes.com/
Le ciné-poème qui suit a pour but de vous faire découvrir l'univers de John Berger. C'est un exercice de création multimédia organisé par Frédéric Fichefet.


                               www.insas.be/2010/01/cine-poeme-5-le-champ