samedi 28 juillet 2012

ESSAI. Ecrits sur l'art. HUYSMANS. (GF Flammarion).

A partir de 1876 Huysmans, qui avait déjà publié des descriptions de tableaux de peintres hollandais, devient chroniqueur d'art pour différents journaux. Il rédige des comptes rendus des différents Salons de peinture et découvre les jeunes artistes indépendants qui exposent à l'écart des Salons officiels dans lesquels leurs oeuvres sont refusées par un jury réactionnaire et soumis à l'état. Ces artistes ont pour nom Manet, Degas, Monet, Caillebote, Forain, Pissaro, Cézanne, Sisley etc. autrement dit la plupart des peintres impressionnistes. Il adhère complètement à leur conception de l'art et défendra le mouvement jusqu'à lui donner ses lettres de noblesse. Il ne cessera de fustiger la peinture officielle et "la médiocrité des gens élevés dans la métairie de Beaux-Arts".
D'un jugement sûr, il possède un oeil aiguisé sur tout ce qui concerne l'art de son temps. Malgré son ironie et son écriture caustique, il sait nuancer ses propos, rester objectif et ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain... tant qu'il ne s'agit pas des peintres officiels et vénaux qu'il traite de "tailleurs et de teinturiers" qui déguisent leurs modèles plutôt que de les prendre dans la rue ou dans leur milieu, tels qu'ils sont, avec leurs habits de tous les jours, dénonçant leur incapacité à peindre le vivant.
La 1ère partie de ce volume de plus de 450 pages , L'Art Moderne, est consacrée à la critique des différents salons de 1879, 1880 et 1881. La seconde, Certains, aligne une suite de choix et Huysmans prend le temps de s'attarder sur le travail de plusieurs artistes: Gustave Moreau, Degas, Raffaelli, Cézanne, Forain, Rops, Millet, Goya, Turner, Odilon Redon etc. analysant les toiles afin de rendre une "vérité chère à l'écrivain". Dans la troisième partie, il rend hommage à "Trois primitifs" parmi lesquels Grünewald qui lui inspire de magnifiques pages.
La critique chez Huysmans devient oeuvre d'art dans laquelle l'humour côtoie la colère ou l'admiration. Il est l'auteur de certains des plus beaux chapitres jamais écrits sur la peinture. Il est capable non seulement de nous faire voir une toile mais également de nous faire respirer l'odeur de la campagne, de nous faire ressentir le froid de la neige, l'humidité des jours pluvieux et même de nous faire entendre la voix des personnages qui deviennent vivants sous sa plume.
Ces "Ecrits sur l'art" sont indispensables à tous ceux qui aiment la peinture et une littérature exigeante mise au service de l'art pictural comme elle l'a rarement été.

dimanche 15 juillet 2012

LITTERATURE. Huysmans au coin de ma fenêtre. CLAUDE LOUIS-COMBET. (Fata Morgana).

L'auteur le dit lui-même, ce livre n'est pas un essai sur Huysmans mais un témoignage de reconnaissance vis à vis d'une écriture qui a imprégné sa sensibilité littéraire, son sentiment esthétique et son sens du spirituel. Il continue aujourd'hui, à 80 ans et après avoir écrit une quarantaine d'ouvrages, à lire celui qu'il appelle "le maître" et conserve pour l'oeuvre comme pour l'homme une véritable admiration. Ceux qui connaissent la qualité, l'exigence et la teneur de l'oeuvre de Claude Louis-Combet apprécieront.Il est rare qu'un écrivain avoue ce qu'il doit à ses prédécesseurs avec une telle simplicité et une  telle humilité: Huysmans est le seul auteur dont je pourrais me réclamer s'il me fallait répondre à une question qui porterait sur le lien établi, dès le début et à la longue, entre l'écriture et l'existence.
Ce superbe livre dans lequel l'écriture est magnifiée donne envie de découvrir ou de redécouvrir autant Claude Louis-Combet que Huysmans ou des artistes qui les ont marqués tous les deux, comme Odilon Redon, Matthias Grünewald ou Félicien Rops.

Né en 1848 , Joris-Karl Huysmans prit une part active à la vie littéraire et artistique de la fin du XIXème siècle. Par son oeuvre de critique d'art, il a fortement contribué à lancer l'impressionnisme et le symbolisme.
Ecrivain d'inspiration ouvertement naturaliste, ami de Zola, il publie son premier roman en 1876. Plusieurs ouvrages de la même veine suivront jusqu'en 1884. Cette année-là,sort A rebours qui rompt brutalement avec le naturalisme en intégrant dans la narration des réflexions sur l'art, la littérature et la spiritualité. Huysmans commence à s'interroger sur la question de la foi. Là-bas (1891) marque la première apparition du personnage de Durtal (dont Claude Louis-Combet dit: J'étais, j'ai toujours été, proche de Durtal et très loin de lui. ) que l'on retrouvera dans les trois romans suivants. Avec En route (1895), l'auteur retrace les étapes de sa longue et difficile conversion au catholicisme. Suivront La cathédrale (1896) et L'oblat (1901). Après sa conversion, Huysmans redécouvre l'art religieux et en particulier la peinture des primitifs qui lui inspirera de magnifiques textes, notamment sur Matthias Grünewald. Il mourra en 1907 d'un cancer de la mâchoire, laissant une oeuvre qui n'a pas vieilli, ni dans la forme ni dans les thèmes abordés.